Rome était la capitale de l’empire romain, capitale de l’empire le plus puissant de l’Antiquité, qui régnait sur la quasi totalité de l’Europe et dont l’image rayonnait à travers le monde connu de l’époque. Elle est la superpuissance du bassin méditerranéen et atteint l’apogée de sa puissance en contrôlant le plus grand territoire en 230 après JC.
Le mythe de la ville de Rome commence avec le mur tracé par Romulus, elle a l’image de la ville ronde, fermée sur elle-même. La ville antique de Rome était entourée par la muraille de l’empereur Aurélien. La superpuissance romaine impose son image, ses codes à tout le bassin méditerranéen c’est pourquoi la fondation de la plupart des villes d’Europe est calquée sur le modèle romain. Rome n’essaie pas d’imiter mais veut être le moteur qui génère cet empire. Rome est un modèle pour le reste du monde.
L’empire romain et son empereur gère « la totalité du monde habité comme une maison » est-ce le même cas pour Las Vegas ? Est-ce que la ville gère ses flux et installations avec la même poigne ?
Las Vegas est un des symboles des Etats Unis (pour nous les Européens ?), peut être le seul endroit où la tentation, le jeu, les plaisirs du corps sont mis sous lumière et revendiqué dans cette Amérique puritaine. L’Etat a eu besoin d’une ville comme cela, dans toute son extravagance pour pouvoir supplanter les autres nations et confirmer son statut de superpuissance mondiale. Las Vegas est dépassé par la propre image qu’elle renvoie. Elle n’est pas juste une ville située dans le désert de Mojave mais la ville du jeu, du casino à l’échelle mondiale, supranationale. C’est une ville sortie du désert dans les années 50, au milieu d’un état dirigé par les Mormons, qui devient le seul état de la côte ouest à légaliser les jeux d’argent. Las Vegas et son Strip attire une clientèle qui vient de tous les Etats Unis. La ville se développe autour du Strip où s’enchaînent les parkings puis au fond de ceux-ci les casinos qui rivalisent d’imagination pour attirer les joueurs.
À partir de la fin des années 80, Las Vegas parie moins sur le jeu pour attirer les clients et confirmer sa suprématie mais tente de diversifier son offre et changer sa réputation de ‘ville du pêché’ en proposant des spectacles et attractions intégrés aux hôtels. A partir de cette période est lancé le concours entre les hôtels pour devenir celui qui construira les choses les plus extravagantes : une pyramide, le Colisée, un roller coaster qui zigzag entre les pieds de la Tour Eiffel ?
Las Vegas n’est plus une ville du fin fond du désert du Nevada mais devient une ville ‘monde’, elle recrée le monde en amenant à elle tout ce qui le compose. En amenant à elle tous ces modèles, monuments, icônes qui viennent du monde entier, elle parvient à s’en dégager et créer son propre modèle qui devient lui-même un exemple de développement pour d’autres villes à travers le monde (comme ville de loisirs ou ville de jeu) ou au sein même des Etats Unis comme modèle d’attraction et de développement économique puisque depuis peu Las Vegas est la ville la plus attrayante du pays.
Rome grâce au dessin défini de ses frontières et son mode de génération projette une image précise, facilement reproductible et identifiable qui peut donc être reproduite et exportée. Las Vegas quant à elle est la ville de l’expansion, qui se développe sur une ligne. Elle est l’image de la ville à expansion tentaculaire bien différente du schéma fermé et structurée de la ville romaine. Pourtant on retrouve le modèle de Rome, peut être pas au niveau du développement urbain et à grande échelle de la ville mais le long du Strip à l’échelle du complexe hôtelier qui lui est structuré et à l’image de la ville ronde.
Nous étudierons cette figure du Resort dans une prochaine entrée.